# 35 Le contrôle inhibiteur, ou l’autre nom de l’auto-contrôle- Partie 1

Dans le monde canin, on parle régulièrement d’auto-contrôle, c’est à dire de la capacité à gérer ses émotions et son impulsivité dans une situation donnée. En neuroscience, on appelle cela le contrôle inhibiteur. C’est la capacité à inhiber, résister et à ne pas agir par impulsivité.

Il est intéressant de voir que, dans le monde normal (le monde sauvage, non humanisé), les animaux, pour leur survie, font appel à cette capacité d’inhibition selon les situations. L’inhibition permet parfois de tirer avantage d’une situation donnée par l’attente, mais aussi la coordination quand il est question de groupe. C’est donc un avantage d’utiliser le contrôle inhibiteur (dans certain cas).

Il existe différentes catégorie de contrôle inhibiteur :

1. L’inhibition cognitive : régule les actions de bas niveau non nécessaires à la tâche en cours

2. L’inhibition motrice : inhibe les réponses prépotentes (patron moteur fort soumis à impulsivité)

3. Le Self-contrôle : le choix d’un renforçateur ultérieur, c’est à dire refuser maintenant pour avoir mieux après (test du marshmalow → si l’individu ne mange pas le marshmalow qui lui est présenté, il en aura alors un deuxième et pourra alors manger les deux)

Chez le chien, il a été montré que ces 3 éléments sont distinct les uns des autres, et sont soumis à différents composantes : persistance, compulsivité et vitesse de décision.

D’accord, mais encore ?

Les études sur les animaux sauvages suggèrent que les individus vivant dans des organisations sociales complexes nécessitent une capacité de contrôle inhibiteur plus importante, indépendamment des capacités cognitives, que les individus solitaires. Cela implique aussi une flexibilité comportementale en raison des changements de partenaires sociaux.

Le contrôle inhibiteur est aussi important dans les interactions coopératives. En effet, dans la coordination des actions, la prise en charge des petits dans un groupe et la sécurité du groupe, le contrôle inhibiteur est de mise, aussi bien pour la protection du territoire que pour la chasse. A tout moment, l’individu doit être capable d’inhiber son envie d’attaquer les proies par lui même afin de se coordonner avec les autres membres du groupe pour une chasse fructueuse.

Cependant, nos amis canidés domestiques sont plutôt chapardeurs et charognards. Donc, pour la coordination de chasse, on pourrait penser que les chiens auraient finalement moins de contrôle d’inhibition en raison de leur mode d’alimentation (concernant les chiens sauvages/libres/non détenu par un humain ) et aussi en raison de l’accès non limité à la nourriture en règle générale (chiens de familles). Et oui, si on loupe la croquette qui court vite, ce n’est pas grave, il y en aura une autre… ^^

Et d’un autre côté, les individus auraient pu être justement sélectionnés durant la domestication en raison d’un meilleur contrôle inhibiteur.

Ainsi se pose la question : Les chiens sont-ils meilleurs en auto-contrôle que les loups ou inversement ? Est-ce que nos amis canidés ont un meilleur self-contrôle que leurs ancêtres ? (si on peut dire les choses ainsi…)

Et c’est justement pour cela qu’une équipe de chercheurs autrichiens a tenté d’évaluer si, entre chiens et loup, il y’ avait une différence concernant le contrôle inhibiteur.

Il est assez difficile d’évaluer ce facteur, car ce dernier est très spécifique au contexte. Selon le contexte, la gestion du contrôle inhibiteur et de la frustration peut être très variable.

Petite parenthèse sur la frustration :

La frustration est définie, opérationnellement parlant, par une réaction émotionnelle aversive due à un oubli volontaire, refus ou incapacité, donc à l’opposition ressentie.

Revenons à notre contrôle inhibiteur.

Une première étude intéressante est arrivée à un résultat assez étonnant.

Les expériences ont consisté en deux tâches d’inhibition classique. La tâche du cylindre transparent et la tâche du V.

La tâche du cylindre transparent consiste à déposer une récompense alimentaire à l’intérieur. Cette expérience se décompose en deux temps :

La phase d’entraînement : phase d’essais avec un cylindre opaque, ouvert des deux cotés, permettant de voir la récompense et d’en avoir un accès rapide.

La phase expérimentale : un cylindre transparent, dont la friandise est visible derrière la paroi est positionné devant le chien ou le loup. Pour accéder à la friandise, l’animal doit faire le tour pour la récupérer via une autre entrée. Cette stratégie nécessite le contrôle inhibiteur qui l’empêchera de se taper la tête contre la paroi transparente du cylindre afin d’obtenir la récompense au plus vite.

Dans cette tâche, on regarde donc la capacité de l’animal à réfléchir au lieu de céder à une impulsion qui se résumerait à un échec légèrement douloureux.

La deuxième tâche est celle du détour V. L’animal doit effectuer un détour par une clôture en V en s’éloignant de la friandise afin de pouvoir l’obtenir.

L’objectif est de voir la stratégie proposée par l’animal, qui est obligé de faire le tour de la clôture en V pour avoir accès à la friandise visible, mais non accessible. La vitesse d’exécution de la tâche et le temps de mise en mouvement afin d’obtenir la friandise sont observés. Ce test suit donc plus ou moins la même stratégie qui est de réfléchir pour mieux agir.

Dans le test du cylindre transparent, les chiens ont battu les loups à plate couture. Les faisant ainsi les rois du contrôle inhibiteur. Cependant, dans la tâche du détour en V, cette fois, ce sont les loups qui furent les champions. Ce résultat a permis de montrer l’aspect contextuel concernant le contrôle de l’inhibition chez nos amis canidés. Et qu’ainsi, ce contrôle inhibiteur est donc beaucoup plus complexe qu’on ne l’imagine.

Il est donc nécessaire de faire des approches multi-tests afin de savoir si, entre chien et loup, il y a une véritable différence d’auto-contrôle, qui serait le résultat de la domestication.

C’est pour cela que cette équipe de recherche a établi différents protocoles afin de tester ce contrôle inhibiteur entre chiens et loups.

A suivre…

La bibliographie apparaîtra dans la suite de l’article.