# 32 Domestication et races : Variations génétiques – Partie 2

Nous avons vu dans la première partie de cet article que le chien ne variait que peu, du point de vue du génome, de son ancêtre le loup1, et qu’aujourd’hui, l’épigénétique2 est mise en avant concernant l’évolution si rapide des différentes races de chien, notamment sur les deux derniers siècles.

Récemment, il a été montré que le gène de l’ocytocine, modulateur clé dans les processus émotionnels et le cerveau social, était un élément clé de la domestication3.

Cependant, d’autres gènes ont été étudiés, et le résultat est intéressant. Des comparaisons ont été effectuées entre différentes races, et plus particulièrement au niveau du cerveau de ces dernières2,4,5.

Et ce ne sont pas moins de 273 gènes qui présentent des modifications épigénétiques chez nos amis canidés ! Et ces gènes sont impliqués, pour la plupart, dans l’anatomie, le comportement, la sécrétion des neurotransmetteurs et la réponse au stress2.

Note : Le nombre de gènes chez le chien est estimé à 19 300 gènes1 répartis sur les 39 paires de chromosomes ! Eh oui, cela en fait des gènes !

Cependant, au niveau de l’ADN, nous serons d’accord qu’il n’y a en effet pas seulement des différences épigénétiques, il y a aussi des différences de type génétique. Cependant ce sont de petites différences, que l’on va appeler SNP : Single nucleotide polymorphism. Cela veut dire que, dans votre recette, vous avez changé une lettre.

Reprenons notre recette pour mieux comprendre :

_découper du filet de poulet en aiguillettes

_les mélanger avec un peu d’huile olive et de curry

_faire chauffer votre poêle

_ajouter un oignon émincé avec un peu d’huile d’olive

_laisser fondre les oignons

_ajouter des petits morceaux de poivrons en petit cube

_déposer le mélange poulet curry.

_cuire 4 minutes de chaque côté.

_ajouter une cuillère de crème entière

_Servir

Nous revoilà donc avec notre poulet au curry. 

Si dans notre recette nous changeons 1 élément :

_découper du filet de poulet en aiguillettes

_les mélanger avec un peu d’huile olive et de curry

_faire chauffer votre poêle

_ajouté un oignon émincé avec un peu d’huile d’olive

_laisser fondre les oignons

_ajouter des petits morceaux de poivrons en petit cube

_déposer le mélange poulet curry.

_cuire 4 minutes de chaque côté.

_ajouter une cuillère de crème entière

_Servir

Ici, nous avons changé un élément (é à la place du er). Au risque de donner des cheveux blanc aux traqueurs des fautes de conjugaison, on s’y retrouve aisément dans la préparation et cela ne change pas vraiment notre recette (voir pas du tout).

Maintenant, si on change un autre élément :

_découper du filet de poulet en aiguillette

_les mélanger avec un peu d’huile olive et de curry

_faire chauffer votre poêle

_ajouter un oignon émincé avec un peu d’huile d’olive

_laisser fondre les oignons

_ajouter des petits morceaux de poivrons en petit cube

_déposer le mélange poulet curry.

_cuire 1 minutes de chaque côté.

_ajouter une cuillère de crème entière

_Servir

Cette fois, nous sommes d’accord, on passera de 8 minutes de cuisson à 2 minutes au total. Pour les aficionados du cru, pourquoi pas, personnellement, j’aime mon poulet bien cuit. Le résultat risque donc d’être assez différent et pas nécessairement bien reçu par notre estomac.

Pourtant, seul un élément a été changé sur toute la recette. C’est cela la force du polymorphisme nucléotidique (ou SNP).

Ainsi, vous commencez à entrevoir les possibilités, entre les modifications épigénétiques et les modifications d’un seul nucléotide sur toute une recette, d’obtenir un résultat bien différent à partir de quelque chose de simple. Il y a une sorte d’effet boule de neige à cela. Ainsi quelques différences par-ci par-là vont produire une gamme incroyable d’individus différents. On commence alors par mieux comprendre comment nous avons réussi à obtenir pas moins de 400 races de chiens différents.

D’accord, mais alors, est-ce que cela veut dire qu’il faut considérer chaque race comme une espèce différente avec des besoins différents ? Et finalement, y-a-t-il des races plus agressives que d’autres ? Plus intelligentes ? Plus sportives ? Ce sont les questions qui sont au cœur des interrogations des chercheurs4,5. Cependant, la prudence est de mise, car l’amalgame est rapide entre un état et un comportement.

Comme dirait un certain Ent6, « Ne soyez pas trop hâtif, Mr Meriadoc…. » eh oui, car il pourrait y avoir des pièges d’interprétation dans lesquels il ne faudrait pas tomber. Comme par exemple partir à la recherche des gènes de l’agressivité en perdant le point de vue comportemental.

Suite et fin dans le prochain article.

Bibliographie

1 Lindblad-Toh et al, 2005, Genome sequence, comparative analysis and haplotype structure of the domestic dog, Nature, 438 (8)

2 Sundman A-S et al., 2020, DNA methylation in canine brains is related to domestication and dog-breed formation. PloS ONE 15(10): e0240787

3 Cimarelli et al., 2017, Social Behavior of Pet Dogs Is Associated with Peripheral OXTR Methylation, Frontiers in Psychology, 58 (549)

4 McLean et zl., 2019, Highly heritable and functionally relevant breed differences in dog behaviour , Proc. R. Soc. B 286: 20190716.

5 Gitanjali E. Gnanadesikan et al., Breed Differences in Dog Cognition Associated with Brain-Expressed Genes and Neurological Functions, 2021, Integrative and comparative Biology 60(4) 976-990

6. J.R.R Tolkien, Le seigneur des Anneaux, 1954-1955